Jusqu’à demain
Poème de Jean-Yves pour son neveu Jocelyn
Que pouvez-vous comprendre
vous qui vivez encore ?
Pris dans la brèche poussiéreuse l’air se faisait plus rare
les pieds serrés et le sourire pale
Sur les hauteurs vers lesquelles tes regards portaient
crissaient les apparences
les rituels ineptes et les coutumes absurdes.
Lentement se refermait le passage
banquise un instant fracturée
silence retrouvé.
J'ai froid maintenant que tes sens sont éteints
J’ai froid pour ceux qui t’ont porté
ont assuré tes pas
J’ai froid pour ta petite sœur
pour tes amis qui tremblaient eux-aussi
devant les exigences et la brutalité
J’ai froid pour ceux qui te ressemblent
que tu aimais en silence…
Toi, il ne peut plus rien t’arriver
aussi je pense aux doutes, aux craintes ancestrales
à la lassitude des visages fermés
à l’épuisement des esprits et des corps
à la répétition des jours, des semaines, des mois, des semaines,
des jours qui poursuivent leur course sans toi
Pourtant tu donnerais toutes tes espérances
pour marcher à nouveau les pieds nus dans le sable
à gaspiller ton temps
à nager
à courir
à t’épuiser enfin
Pourtant tu donnerais toutes tes espérances
pour faire vibrer Bach en maîtrisant ton souffle
Pourtant tu donnerais toutes tes espérances
pour jouer une fois
une fois seulement
le coup inénarable
qui laissera pantois tous les maîtres de Go
Tout, tu donnerais tout
pour t’enivrer sans fin
de thé vert
de rire et d’insouciance
jusqu’à demain